Last Updated: 5 September 2021Tags:

Le ton est donné dans le monde du lymphome avec un accent mis sur l’immunothérapie et le « chemo-free ». Cette année encore, les résultats des différents essais encouragent en ce sens. Voici un aperçu du crue 2021 pour les lymphomes. 

Le lymphome B diffus à grandes cellules : DESCAR-T et des BITEs, avec un soupçon d’anticorps monoclonal, même pour nos séniors. 

Les résultats du registre national DESCAR-T présentés par Steven le Gouill(1) ont confirmé les données renversantes de l’utilisation de l’axi-cel et du tisa-cel chez les patients avec un lymphome B diffus à grandes cellules (DLBCL) en rechute ou réfractaire. Les données de vie réelle concordantes avec les résultats des essais cliniques pivots comme JULIET, ZUMA-1 ou TRANSCEND avaient été rapportées précédemment par Vercellino et coll(2). L’information supplémentaire de DESCAR-T est d’intégrer les données concernant les patients éligibles mais n’ayant pas reçu les lymphocytes chimériques (échec de recueil, refus secondaire, progression tumorale, etc.). La médiane de durée de réponse à 6 mois était de 57,7% (51,6-63,3) avec une médiane de PFS (Progression Free Survival) à 6 mois de 44,5% (39,2-49,2). 

En concurrence, en alternative ou en post-CAR T cells dans les essais à venir, les anticorps bispécifiques démontrent des résultats très intéressants dans les DLBCL notamment dans l’étude de phase I/II présentée par R. Mous(3) sur l’epcoritamab, anticorps bispécifique CD20-CD3 qui a l’avantage d’être réalisable en sous-cutané, où 68 patients incluant majoritairement des DLBCL mais aussi des lymphomes du manteau ou des folliculaires transformés étaient traités en monothérapie. Ils avaient reçu une médiane de 3 lignes antérieures avec une autogreffe chez 22% et 6 patients avaient reçu des CAR T cells. Les effets secondaires étaient limités : 59% de syndrome de relargage cytokinique (CRS) et tous de grades 1 et 2. Avec un suivi médian de 14,1 mois, la réponse globale chez les patients DLBCL était de 68 % à 12 mg et 91 % à 48 mg. Le temps médian de réponse est court : 1,4 mois (1-4) avec un temps médian de réponse complète de 2,7 mois (1,1-3,9). La PFS médiane est de 9 mois pour la dose de 12 mg et est non atteinte pour 48 mg (figure 1).

A. Olszewski(4) présentait quant à lui les résultats de l’étude de phase 1/2 prospective multicentrique sur le mosunétuzumab (Mosun) en monothérapie chez les patients âgés ou altérés, en 1ère ligne d’un DLBCL. Le Mosun est un anticorps IgG1 bispécifique CD20-CD3 qui a démontré son efficacité et sa sécurité dans l’essai de phase 1 chez des patients en rechute ou réfractaire. Les résultats préliminaires sur 2 cohortes de doses (13,5 et 30 mg) montrent chez des patients dont la médiane d’âge est de 84 ans (67-100) et dont 80% avaient un score IPI supérieur ou égal à 2, une réponse globale de 67,7% et un taux de réponse complète de 41,9%. 87,5% des patients ont présenté un effet indésirable lié au traitement, 22,5% un CRS, de grade I-II majoritairement. 

Pour continuer de mettre à l’avant nos séniors, K. Oiwa(5), a confirmé l’importance du score G8 chez les patients de plus de 75 ans dans l’évaluation et la prise en charge thérapeutique. Dans cette étude rétrospective multicentrique japonaise, sur 398 patients et avec un suivi médian de 22,4 mois, 43,5% des patients sont décédés, principalement à cause du lymphome (64,8 %). L’analyse multivariée a permis de démontrer que le score G8 était un facteur pronostique indépendant (HR = 0.854, IC = 95% ; 0.808-0.902, p<0.001) sur la survie globale. Une association linéaire démontre un risque accru de mortalité, surtout si le G8 est inférieur à 9.

Enfin, l’étude L-MIND dont les résultats à plus long terme ont été présentés par J. Düll(6), renforce les résultats d’efficacité de cet anticorps monoclonal anti CD19, en association avec le lénalidomide, chez les patients DLBCL en rechute ou réfractaire. Les patients avaient été traités au préalable par 1-3 lignes incluant un anticorps monoclonal anti CD20 et étaient non éligibles à une autogreffe de cellules souches. Le tafasitamab était administré par voie parentérale, une fois par semaine des cycles 1 à 3, puis tous les 14 jours durant les cycles 4 à 12 (cycles de 28 jours). Les patients en réponse à l’issue de cette 1ère année de traitement, recevaient du tafasitamab en entretien tous les 14 jours jusqu’à progression. Le lénalidomide suivait un schéma classique de 25 mg par jour, 21 jours/28, pendant 1 an. À l’issue de l’analyse, le taux de réponse globale était de 57,5% avec un taux de réponse complète de 40%. La PFS médiane est de 11,6 mois et la médiane de survie globale de 33,5 mois (figure 2). À noter que chez les patients traités dès la 1ère rechute, la durée médiane de réponse est de 43,9 mois avec une médiane de survie globale de 45,7 mois.  Le profil de toxicité était essentiellement hématologique, avec notamment aucun CRS ni syndrome de lyse tumoral. 

Macroglobulinémie de Waldenström : résultats à 5 ans de l’étude iNNOVATE.

L’étude de phase 3 internationale publiée en 2018 par M. Dimopoulos avait démontré la supériorité de l’association ibrutinib-rituximab versus rituximab en monothérapie dans la maladie de Waldenström, permettant l’autorisation d’utilisation de la combinaison thérapeutique. Les résultats à 5 ans sont présentés ici par R. Garcia-Sanz(7) : la médiane de PFS n’est pas atteinte dans le bras IR (NR ; IC = 95%) contre 20.3 mois (IC = 95% ; 13.0−27.6) dans le bras R + placebo (HR = 0.25 ; 0.15−0.42, p <0.0001). La PFS estimée à 54 mois est de 68 % dans le bras IR contre 25 % dans le bras rituximab (figure 3). L’avantage obtenue par l’association IR est indépendant de l’âge, du stade de la maladie, du statut de performance OMS, du statut mutationnel MYD88 et CXCR4, du nombre de lignes antérieures, etc. Le taux de réponse globale est de 92% contre 44% dans le bras R (p <0.0001). Le temps médian de passage à une nouvelle ligne thérapeutique n’est pas atteint dans le bras IR contre 18 mois dans le bras R. Il n’y avait pas de différence de survie globale au terme de l’analyse. Les analyses de sécurité montraient une diminution des effets indésirables de grade 3 ou plus avec le temps dans le bras IR. 

LE LYMPHOME T : le brentuximab vedotin nous fait gravir un échelon

E. Domingo Domènech nous a présenté les résultats réactualisés à 5 ans de l’étude ECHELON-2(8), étude randomisée en double aveugle qui comparait brentuximab vedotin (BV)-cyclophosphamide- doxorubicine-prednisone (BV-CHP) à du CHOP (cyclophosphamide-doxorubicine-vincristine-prednisone) chez 453 patients atteints d’un lymphome T périphérique en 1ère ligne(9). 70% des patients présentaient un lymphome anaplasique (48% ALK-, 22% ALK+) d’un stade avancé. La médiane de PFS est de 62,3 mois pour BV-CHP contre 23,8 mois pour le CHOP (HR = 0.70 ; IC = 95% ; 0.53, 0.91, p=0.0077). La médiane de survie globale n’était pas atteinte mais la survie estimée à 5 ans est de 70,1% (IC = 95% ; 63.3-75.9) dans le bras BV-CHP contre 61,0% (IC = 95% ; 54.0-67.3) dans le bras CHOP (HR=0.72 ; IC = 95% ; 0.53, 0.99, p=0.0424). En termes de tolérance, le principal effet indésirable était la neuropathie périphérique, majoritairement transitoire, qui touchait de manière équitable les 2 bras (environ 70% des patients). Ceci représente une grande avancée dans la prise en charge du lymphome T périphérique, au pronostique encore sombre et dont les ressources thérapeutiques sont moindres. 

Lymphome de Hodgkin : le brentuximab vedotin vient challenger le BEACOPP !

Le groupe allemand d’étude sur le lymphome de Hodgkin (LH) a présenté les résultats de l’étude de phase 2 randomisée sur des variants du BEACOPP escaladé à base de BV dans les formes avancées de LH(10). Entre octobre 2012 et novembre 2014, 104 patients avec un LH de stade avancé, ont été randomisés pour recevoir soit du BrECADD (BV, étoposide, cyclophosphamide, doxorubicine, dacarbazine, dexaméthasone), soit du BrECAPP (BV, étoposide, cyclophosphamide, doxorubicine, procarbazine, prednisone). Après un suivi médian de 34 mois, la PFS estimée à 3 ans est de 89,7% (IC = 95% : 81.0%>98.3%) et 90.2% (IC = 95% : 80.9%>99.5%) pour le BrECADD et le BrECAPP respectivement. Il y a eu 8 rechutes ou progression dans un délai médian de 13 mois, 4 dans chaque bras de traitement. La survie globale estimée à 3 ans est de 95.4% (IC = 95% : 89.2%>100%) pour le bras BrECADD et de 100% pour le bras BrECAPP. Ces résultats très prometteurs en 1ère ligne du LH pousse à challenger le BEACOPP escaladé aux toxicités à long terme non négligeables. Le BrECADD sera comparé directement dans une étude de phase 3 menée par le GHSH au BEACOPP escaladé (HD21). 

 

Références

  1. Steven le Gouill and al. First results of dlbcl patients treated with car-t cells and enrolled in descar-t registry, a french real-life database for car-t cells in hematologic malignancies. #216, EHA 2021.
  2. Vercellino L, and al. Predictive factors of early progression after CAR T-cell therapy in relapsed/refractory diffuse large B-cell lymphoma. Blood Adv. 2020 Nov 24;4(22):5607-5615. doi: 10.1182/bloodadvances.2020003001. PMID: 33180899; PMCID: PMC7686887.
  3. Mous R and al. Subcutaneous epcoritamab in patients with relapsed/refractory b-cell non-hodgkin lymphoma: safety profile and anti-tumor activity. #EP449, eha 2021.
  4. Olszewski A and al. Mosunetuzumab (mosun) monotherapy for elderly/unfit patients (pts) with first-line diffuse large b-cell lymphoma (dlbcl) continues to show promising safety and efficacy with durable complete responses. #EP503, eha 2021.
  5. OIWA K and al. The impact of the geriatric 8 score on overall survival in older adults with diffuse large b-cell lymphoma. #EP522, EHA 2021.
  6. Düll J and al. Long-term analyses from l-mind, a phase ii study of tafasitamab (mor208) combined with lenalidomide in patients with relapsed or refractory diffuse large b-cell lymphoma (r/r dlbcl). #PB1444, EHA 2021.
  7. Garcia-Sanz R and al. Ibrutinib plus rituximab (ir) vs placebo plus rituximab (r) for waldenstrom’s macroglobulinemia (wm): final analysis after five years of follow-up from the randomized phase 3 innovate study. #EP782, EHA 2021.
  8. Domingo Domènech E and al. Echelon-2, (nct01777152), 5-year results of a randomised, double-blind, phase 3 study of frontline brentuximab vedotin + chp vs chop in patients with cd30-positive peripheral t-cell lymphoma. #EP506, EHA 2021.
  9. Horwitz S, O’Connor OA, Pro B, and al. ECHELON-2 Study Group. Brentuximab vedotin with chemotherapy for CD30-positive peripheral T-cell lymphoma (ECHELON-2): a global, double-blind, randomised, phase 3 trial. Lancet. 2019 Jan 19;393(10168):229-240. doi: 10.1016/S0140-6736(18)32984-2. Epub 2018 Dec 4. Erratum in: Lancet. 2019 Jan 19;393(10168):228. PMID: 30522922; PMCID: PMC6436818.
  10. Carla Damaschin and al. Brentuximab vedotin-containing escalated beacopp variants for newly diagnosed advanced classical hodgkin lymphoma: follow-up analysis of a randomized phase ii study from the german hodgkin study group. #S209, EHA 2021. #S209, EHA 2021.

 

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