Intérêt de la maintenance par azacitidine per os dans les leucémies aiguës myéloïdes (LAM) : résultats de l’étude QUAZAR AML-001

Réf.:HematoStat.net ; 1 (10) : U3

Traitement d’entretien à l’azacitidine par voie orale pour la leucémie myéloïde aiguë en première rémission

Oral Azacitidine Maintenance Therapy for Acute Myeloid Leukemia in First Remission(1).

D’après Wei et al. N Engl J Med.  2020 Dec 24;383(26):2526-2537.

Contexte de l’étude

Après une induction standard, une rémission complète est obtenue dans 40 à 60% des cas chez les patients de plus de 60 ans avec LAM. Le problème est que la rechute survient chez 80 à 90% des patients. La prévention de ces rechutes reste un enjeu majeur de la prise en charge et notamment chez les patients ne pouvant pas recevoir une allogreffe de cellules souches hématopoïétiques (CSH). Se pose la question du traitement de maintenance pour prolonger la durée de RC. Le traitement de maintenance par midostaurine est déjà approuvé pour les patients avec LAM FLT3 mutées et le traitement par azacitidine per os a prouvé son intérêt chez les patients âgés.

Objectif de l’étude

Le but de cette étude de phase 3 multicentrique, randomisée, en double aveugle, était de tester contre placebo, le traitement de maintenance par azacitidine oral (CC-486) chez les patients atteint de LAM, âgés d’au moins 55 ans, en 1ère RC après induction, avec ou sans consolidation et inéligibles à l’allogreffe de CSH.

Résultats de l’étude

De mai 2013 à octobre 2017, 472 patients ont été randomisés dans l’essai (238 bras CC-486 et 234 bras placebo). L’âge médian est de 68 ans et 91% des patients ont une LAM de novo avec une cytogénétique intermédiaire dans 86% des cas. Tous les patients ont reçu une induction à base de cytarabine combinée à des anthracyclines ou équivalent. Quatre-vingt pour cent des patients ont eu au moins une consolidation avant d’entrer dans l’étude. Avec un suivi médian de 41.2 mois, la survie médiane était de 24.7 mois dans le bras CC-486 versus 14.8 mois dans le bras placebo (p<0.001, figure 1).

Figure 1 : survie globale des patients.

Ce bénéfice est observé quel que soit le nombre de consolidation et que les patients soient en RC post-induction ou avec une maladie résiduelle positive. En termes de survie sans rechute, l’étude est également positive avec une médiane à 10.2 mois dans le bras expérimental versus 4.8 mois dans le bras placebo (figure 2).

Figure 2 : survie sans rechute.

Les études de qualité de vie n’étaient pas en défaveur du bras CC-486. Du point de vue toxicité, l’effet secondaire le plus fréquemment décrit est gastro-intestinal avec des nausées, vomissements et diarrhées, surtout pendant les 2 premiers cycles ; cette complication était la cause plus fréquente d’arrêt dans le bras CC-486. La neutropénie est la complication qui conduisait le plus fréquemment à une modification de dose dans les 2 groupes.  

Quels impacts sur les connaissances et les pratiques cliniques ?

Si ces données prometteuses se confirment, le CC-486 pourrait obtenir rapidement une autorisation d’utilisation, avec l’avantage par rapport à la 5-azacitidine d’une prise per ossimplifiant nettement le parcours des patients. Il reste à évaluer son intérêt dans les autres indications de la 5 azacitidine, immunomodulations post-greffe notamment.

Critique méthodologique

Cette étude provient d’un essai de phase 3 randomisé en double-aveugle versus placebo, le caractère “double-aveugle” apportant la garantie que l’effet du traitement soit sans biais sur les divers outcomes (on pense à la qualité de vie qui est un des critères secondaires avec la survie sans rechute et la safety). Il n’y a pas eu d’analyse intermédiaire ; cette étude est allée à l’essentiel avec comme objectif principal la survie globale avec courbe de Kaplan-Meier à l’appui.

La méthodologie statistique employée est restée relativement simple et classique également, il n’y a pas eu – par exemple – d’ajustement pour la multiplicité de tests, etc. De plus, étant donné que l’hypothèse de proportionnalité était violée, les résultats n’ont pas été communiqués sous forme de hazard-ratio mais à travers les médianes de survie et un test de log-rank stratifié. Ceci a eu également un impact sur la présentation du forest plot (analyse en sous-groupes) qui se base sur la survie à 2 ans.

Points forts Points faibles
Cliniques
  • Le traitement CC-486, qui a l’avantage d’être administré per os offre un avantage significatif de survie par rapport au placebo chez les patients avec LAM en RC après traitement intensif, avec ou sans consolidation.
  • L’étude offre aussi l’avantage de dépister précocement les rechutes avec une évaluation médullaire tous les 3 mois.
  • Il n’y a pas de corrélation faite entre les 2 bras de traitement et les profils moléculaires et le pronostic ELN des patients.
  • Les patients défavorables bénéficient-ils réellement de ce traitement ?
Statistiques
  • Essai clinique robuste suivant le gold standard.
  • Publication qui va droit au but dans ses objectifs et résultats sans ambiguïté.
  • Le fait que l’hypothèse de proportionnalité soit violée a probablement limité le choix des analyses (il n’y a pas eu d’analyses de sensibilité, le forest plot qui n’était pas basé sur des hazard-ratios,…).

Référence :

1 – A.H. Wei and al. Oral Azacitidine Maintenance Therapy for Acute Myeloid Leukemia in First Remission. N Engl J Med.  2020 Dec 24;383(26):2526-2537. doi: 10.1056/NEJMoa2004444.

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